« On a un terrain de golf et une piscine. On a un aréna, mais il ouvre
seulement en hiver. On a des panneaux d’arrêt et des rues asphaltées, mais
on n’a rien qui a l’air d’un feu de circulation ou de trucs du genre. »
Le fait que Denton Mateychuk sente qu’il a besoin de dire que son village
d’origine a des rues asphaltées confirme tout ce dont vous avez besoin de
savoir à propos de la superficie de Dominion City, au Manitoba.
Selon le recensement du Canada de 2016, le village – situé à 90 kilomètres
au sud de Winnipeg, à seulement 15 minutes de la frontière entre le
Manitoba et le Minnesota – compte seulement 353 habitants, ce qui en fait
le plus petit village natal d’un des 113 joueurs qui assistent cette
semaine au camp national de développement des moins de 17 ans du Canada,
présenté en ligne.
Le village d’un autre Manitobain au camp présente des statistiques
similaires.
« Il y a une caisse populaire, une épicerie et une station d’essence. C’est
tout ce qu’il y a », répond Conor Geekie, à propos de la municipalité de
Strathclair, située à une heure au nord-ouest de Brandon et dont la
population était de 709 personnes en 2016. « Il y a environ 120 à 140
habitants là-bas. »
Les chiffres ne sont pas importants. Qu’on puisse prétendre qu’un village
est le plus petit, ça importe peu. Ce qui est important, c’est le parcours.
Le duo de Manitobains – de même que Kalem Parker (Clavet, Sask. – pop. de
410), Jordan Gustafson (Ardrossan, Alb. – pop. de 412) et Donovan Arsenault
(Richmond, Î.-P.-É. – pop. de 755), ainsi que d’autres au camp des M17 –
sont la preuve que les produits de petits villages ont la possibilité de se
rendre jusqu’au Programme d’excellence.
Les deux joueurs ont gravi les échelons de leur association de hockey
locale – Mateychuk avec l’Association de hockey mineur des Southern
Steelers et Geekie avec l’AHM de Strathclair – les deux se sont rendus
jusqu’au programme de la haute performance de Hockey Manitoba et ont été
parmi les premiers choix du repêchage bantam 2019 de la WHL – Geekie
deuxième au total de l’Ice de Winnipeg, neuf rangs avant Mateychuk, qui a
été un choix des Warriors de Moose Jaw – et les deux se sont taillé un
poste au sein de la formation canadienne qui a pris part aux Jeux
olympiques de la jeunesse d’hiver 2020. Cependant, Geekie a eu une
mononucléose quelques semaines avant le tournoi, ce qui l’a empêché de
jouer au tournoi.
Alors, qu’en est-il de la notion que ce sont les joueurs des grandes villes
qui attirent toute l’attention? Ils n’y croient pas.
« Peu importe où vous êtes, ils vous trouveront », affirme Mateychuk. «
Il suffit de jouer, de s’amuser et de laisser le hockey vous mener là
où il vous mènera
. »
Le plaisir en jouant au hockey a toujours été au rendez-vous. Le fait
d’avoir grandi dans un petit village y est pour beaucoup. Mateychuk a été
un gardien de but dans sa jeunesse – « Je pense que tu es un peu meilleur
comme joueur que comme gardien de but, alors faisons un essai », lui a dit
son père après quelques cuisantes défaites – et Geekie a joué une saison au
cours de laquelle son équipe comptait 10 joueurs, soit sept filles et trois
garçons.
Mais quand on disait que c’était le parcours qui était important, c’est
exactement ça; Mateychuk et Geekie n’hésitent pas à affirmer que leur
village leur a permis de devenir les jeunes hommes qu’ils sont aujourd’hui
et que leur association de hockey locale les a aidés à forger leur jeu.
« Je pouvais marcher à l’aréna à partir de ma maison et patiner quand je le
voulais », raconte Geekie. « En grandissant dans une petite association de
hockey locale, il y avait des jeunes qui en étaient à leur première année
au hockey. Je devais m’assurer qu’ils touchent à la rondelle. Je devais les
faire marquer un but. Pour moi, c’était un jeu au sein du jeu. »
Comme Geekie le mentionne, l’un des avantages de vivre dans un petit
village est l’accès facile à une patinoire. Il avait la clé du Strathclair
Arena, tandis que le père de Mateychuk, Jason, travaille au Dominion City
Arena, et n’hésitait pas à débarrer les portes, peu importe quand un de ses
quatre fils voulait patiner.
Évidemment, dans les Prairies, il y a quelques particularités avec
lesquelles les joueurs des grandes villes ne sont pas familiers.
« On a des vaches dans l’aréna en été jusqu’au mois de septembre environ »,
confie Geekie en riant. « Ensuite, la glace est faite par-dessus la terre.
»
Mateychuk et Geekie savent que leur parcours peut ressembler à celui de
joueurs de petits villages de la Colombie-Britannique à
Terre-Neuve-et-Labrador. Alors, quand ils ont l’occasion de partager
quelques conseils, ce n’est pas surprenant qu’ils ne fassent aucune
allusion aux tirs du poignet ou à la durée des présences sur glace.
Ils font plutôt référence à des valeurs propres aux petits villages qui ont
marqué leur éducation.
« Il faut travailler sans relâche », lance Geekie. « Il n’y a pas de limite
au travail qu’on peut accomplir. Le succès viendra, peu importe quand il
viendra, et si tu es dû pour en avoir, tu en auras. Il suffit de se
concentrer à jouer son jeu. Il n’y a aucune raison de changer. Et il faut
toujours être une bonne personne. On m’a toujours enseigné ça en
grandissant. Tu peux être vraiment mauvais au hockey, mais si tu es une
mauvaise personne, je ne vois pas où tu peux te rendre. »