Le leadership n’a jamais été un problème pour l’équipe nationale féminine
du Canada.
St-Louis, Brisson, Campbell, Wickenheiser, Poulin… L’histoire d’Équipe
Canada regorge de femmes de caractère qui ont montré l’exemple sur la glace
et ailleurs.
Pourtant, le leadership ne se limite pas à une lettre sur un chandail. Pour
Judy Riege, accompagnatrice et pédagogue en leadership de renom à la tête
de l’entreprise Connected Leaders, le
leadership est un état d’esprit, et non un poste.
Riege, qui dit travailler dans le domaine de la communication, des
relations et de la curiosité, collabore avec le programme de l’équipe
nationale depuis 2019. Un autre chapitre de cette relation a été écrit
cette semaine au camp d’entraînement BFL de l’équipe nationale féminine,
présenté par Sobeys.
« Comme athlètes, nous sommes très privilégiées de participer à ces camps
et nous sommes entourées des plus grands experts dans leur domaine »,
soutient Laura Stacey, vétérante de l’équipe nationale. « C’est exactement
le cas de Judy. Elle apporte une autre solution, un autre outil qu’on peut
ajouter à notre coffre. Je trouve ça incroyable de pouvoir combiner ses
connaissances avec les outils qu’on élaborait déjà avec Kim Thompson,
conseillère en performance mentale, et notre personnel d’entraîneurs. »
« Nous sommes très chanceuses qu’elle fasse partie de ce processus pour
continuer de nous pousser de l’avant et trouver des manières de quitter
notre zone de confort. Voir jusqu’où nous pouvons aller et quel niveau nous
pouvons atteindre. »
Après son atelier au camp, Hockeycanada.ca a rencontré Judy Riege pour en
savoir plus sur les concepts et l’état d’esprit qu’elle propose à Équipe
Canada.
HC : Quel est votre lien avec le hockey?
JR : Je suis une amatrice. J’ai été le parent d’enfants qui pratiquent le
hockey. Je suis essentiellement une fière Canadienne, et le hockey, tout
comme le sport en général, a toujours fait partie de ma vie. Je crois qu’il
s’agit d’une façon merveilleuse pour les communautés et le pays dans son
ensemble de s’unir autour d’un sport.
HC : Comment avez-vous commencé à vous impliquer auprès de Hockey
Canada?
JR : En fait, mon travail auprès de Hockey Canada date d’il y a longtemps,
avant même les Jeux olympiques de 2014 à Sotchi. J’avais alors collaboré
avec Mel Davidson en ce qui a trait à la planification stratégique et aux
objectifs à long terme du programme de hockey féminin. Il y a eu une pause,
puis j’ai fait la rencontre de Troy Ryan, l’entraîneur-chef, à la fin de
2018. Après avoir travaillé avec les entraîneurs, j’ai eu la chance de
travailler avec les joueuses, surtout concernant la notion de leadership,
les équipes de la haute performance et, plus précisément, les liens entre
la neuroscience et l’intelligence émotionnelle, d’une part, et la teneur de
nos relations interpersonnelles et notre optimisation de cette dimension,
d’autre part.
HC : Quels sont vos objectifs dans le cadre des ateliers?
JR : Quand on pense aux réalisations de grandes équipes, ces dernières ont
des assises formidables en matière de confiance. Et quand on réfléchit à la
notion de confiance, on ne porte pas toujours attention aux liens
neurobiologiques qui nous unissent. Cette confiance constitue en fait le
fondement du niveau d’aisance qui s’installe les uns envers les autres.
Donc, mon travail a toujours eu trait au leadership et à la performance
collective parmi l’élite, pour mettre en lumière les aspects qui sont
parfois négligés – nos propos, notre façon de poser des questions, notre
écoute, notre manière de communiquer entre nous, avec nos entraîneurs, et
les communications entre entraîneurs et athlètes. Quelles sont mes
réflexions? Quelles sont les émotions que je ressens? Quelle est l’image
que je projette? Quel impact ai-je sur les autres? Il s’agit aussi de
savoir établir cette compréhension mutuelle que nous sommes tous
différents. Lorsque nous comprenons ces différences et que nous renforçons
nos relations de la sorte, notre potentiel de réalisation individuelle et
collective ne s’en porte que mieux.
HC : Comment votre travail a-t-il été accueilli par les joueuses et par
le personnel de l’équipe?
Ce fut incroyable. Je me suis demandé ce que je pouvais accomplir auprès de
ces athlètes de la haute performance et comment je pouvais apporter une
valeur ajoutée au programme. Donc, toutes les conversations qui ont précédé
les présentations tournaient autour du fait de développer la culture de
l’équipe. L’équipe veut mettre l’accent sur ce que les joueuses peuvent
accomplir pendant les jours « rouges », soient ceux où elles ne sont pas
ensemble. Ainsi, mon travail se veut l’une des pièces du casse-tête, et il
va sans dire que le niveau d’engagement, les commentaires et les
conversations qui prennent place dans les espaces que nous avons créés
ensemble ne sont rien de moins que magiques.
HC : À quel point est-ce important pour ces athlètes de se doter de
différentes façons de bonifier leurs habiletés sur glace?
JR : L’intelligence émotionnelle d’une personne consiste en sa capacité à
se concentrer sur elle-même dans le moment présent, ses réflexions, ses
émotions, la direction qu’elle doit prendre et les gestes qu’elle doit
poser. Parallèlement, c’est sa capacité à percevoir ce que les autres
vivent, où ces personnes se situent, leurs propres réflexions et émotions.
Puis, entre en jeu le troisième aspect : la combinaison de ces éléments.
Comment ceux-ci prennent-ils forme dans le moment présent? Et tout repose
sur le moment présent. Lorsque nous faisons collectivement ce travail qui
consiste à chercher comment nous allons gagner ensemble, dans le contexte
des relations qui nous unissent – surtout pour les membres de l’équipe –,
et à réaliser que l’ennemi n’est pas au sein de l’équipe, mais sur la
glace, je crois que c’est là que le changement s’opère. Selon moi, nous
faisons souvent l’erreur de faire correspondre l’élévation du potentiel à
un effort individuel, alors qu’en réalité, c’est notre unité qui nous rend
meilleurs dans toutes les facettes de nos vies. Pour ce faire, il suffit de
suivre les étapes simples, mais exigeantes, qui permettent de favoriser ce
que j’appelle un écosystème de potentiel. De cette manière, en développant
son propre potentiel, chacun en fait de même pour le potentiel des autres.