Line Laurendeau n’hésite pas lorsqu’on lui demande si elle préfère l’eau à
l’état naturel ou à l’état gelé.
« L’eau », dit Laurendeau avec un petit rire. « Il existe un certain calme
à la mer auquel rien ne se compare. Partir à l’étranger, c’est ce que la
marine m’a donné. L’occasion de rencontrer de nouvelles personnes et de
faire une différence dans leur vie. Si je fais une différence, j’ai
l’impression d’avoir fait mon devoir. »
Laurendeau a passé sa vie sur l’eau, sur les hautes mers qu’elle décrit, et
sur la glace, principalement, en tant que gardienne de but. La navigation
est sa vraie passion, mais qui dit qu’une personne ne peut avoir deux
choses dans sa vie dont elle ne saurait se passer?
La vétérante des Forces canadiennes, qui a servi pendant 26 ans, est aussi
une mordue du hockey ayant joué dans la ligue militaire pendant un quart de
siècle, participant notamment à 17 championnats nationaux militaires,
remportant le titre de Meilleure gardienne de but à deux reprises et
remportant un titre national, une fois, en 2004.
La femme de 48 ans a commencé à jouer à l’âge de huit ans. Elle était alors
gardienne de but et elle continue de bloquer des rondelles encore
aujourd’hui. Elle affirme que ses deux passions, le hockey et le service
militaire, s’allient parfaitement.
« C’est une grande famille. Chez les militaires, vous ne faites rien
seul », a expliqué Laurendeau lorsqu’on lui demande en quoi le hockey et
l’armée sont semblables. « Si quelqu’un traverse une période difficile,
vous êtes là, vous lui remontez le moral et vous l’aidez de nombreuses
façons. Quelqu’un peut avoir de la difficulté et vous devenez un frère, une
sœur ou un parent; vous êtes là les uns pour les autres. »
« Quand vous regardez une équipe de hockey, c’est exactement la même chose.
Vous tirez de l’arrière 2-1 et vous avez besoin que le chef de file de
l’équipe vous dise “Reprenons-nous après ce but et nous serons à nouveau
dans le match.” Tous doivent avoir confiance les uns dans les autres. C’est
la même chose chez les militaires, ils croient les uns aux autres. Si nous
effectuons des tâches humanitaires, nous devons être synchronisés afin de
faire une différence pour les personnes dans le besoin. »
Aider les gens est la raison pour laquelle Laurendeau fait ce qu’elle fait.
Elle a effectué de nombreux voyages à l’étranger pour venir en aide aux
personnes dans le besoin, notamment dans le golfe Persique, en mer de Chine
méridionale et au Vietnam.
Ses plus beaux souvenirs sont d’aider les enfants, y compris le voyage de
l’an dernier au Vietnam, où Laurendeau et son équipe ont pu obtenir des
fonds pour aider les enfants souffrant de maladies liées à l’agent orange,
un puissant herbicide utilisé par l’armée américaine pendant la guerre du
Vietnam pour éliminer la couverture forestière et les cultures.
Laurendeau affirme que les plus petits gestes de gentillesse peuvent
changer la vie de quelqu’un comme ces enfants qu’elle a initiés aux bulles
de savon et à la peinture, eux qui n’avaient jamais vu ça.
Laurendeau, premier maître de 1re classe (le plus haut grade
chez le personnel sous-officier de la Marine royale canadienne), a été
invitée en juin dernier au gala annuel de la Fondation Hockey Canada pour
représenter les Forces armées canadiennes. C’est un souvenir qu’elle
chérira pour toujours, car Laurendeau a pu côtoyer certaines des plus
grandes joueuses de hockey de tous les temps – de Cassie Campbell-Pascall à
Charline Labonté et Danielle Goyette.
Pour Laurendeau, qui semble vouloir diriger le feu des projecteurs vers
tous les autres sauf elle pour avoir fait avancer le volet féminin du
sport, dit que le temps qu’elle a passé à Edmonton a surtout été consacré à
remercier les pionnières du hockey féminin.
« Je peux vous dire que j’ai 48 ans aujourd’hui, mais je me sentais comme
si j’en avais 10. J’ai grandi en les regardant. En leur parlant et en
voyant où elles en sont aujourd’hui, j’ai eu la chance de leur serrer la
main et de les remercier pour ce qu’elles ont fait. Je me souviens d’avoir
rencontré Cassie Campbell. Je lui ai dit “Vous avez jeté les bases pour les
joueuses de hockey, non seulement professionnellement, mais aussi chez les
militaires.” Avoir eu la chance de les remercier a rendu cette journée
mémorable. C’était génial. »
Comme pour beaucoup de ceux et celles qui jouent depuis des années, les
plus beaux souvenirs de Laurendeau rempliraient plusieurs pages. Cependant,
il y a un souvenir de sa carrière de joueuse qui se démarque des autres.
Bien qu’elle ait pris part à 17 championnats nationaux militaires, c’est le
tournoi de 2004 qui semble raviver le plus de souvenirs. Laurendeau était
la gardienne de but de la BFC Esquimalt et elle a aidé l’équipe dans sa
conquête du titre national, un titre aussi inattendu que la célèbre
victoire américaine de 1980 surnommée le Miracle sur la glace.
« Je m’en souviendrai pour le reste de ma vie. Cette année-là, notre équipe
a finalement pu remporter l’or », dit-elle. « Nous n’étions pas la
meilleure équipe. Je sais que beaucoup de gens disaient que nous ne
gagnerions pas. Je me souviens avoir dit “Si vous le voyez, vous y
parviendrez. J’y crois et je crois en vous.” C’était comme le film Miracle.
Tout tombait en place. Lorsque nous avons soulevé cette coupe, la quantité
d’émotion que nous avions… nous en parlons encore aujourd’hui et c’est
comme si c’était hier. »
Laurendeau continue d’être active au sein des forces militaires et au
hockey. Depuis près de 10 ans, elle agit comme officielle dans le sport
pour tenter de redonner à cette passion qui lui a tant donné. En 2016, elle
a eu l’honneur d’agir comme officielle lors de la Coupe du monde de hockey
de la CARHA, les Olympiques du hockey récréatif, et elle portera à nouveau
le chandail rayé lors du tournoi de 2020 à Richmond, en
Colombie-Britannique.
Laurendeau mentionne souvent qu’elle n’est qu’une joueuse dans la grande
famille du hockey militaire et elle s’assure que ses superviseurs et celles
qui sont venues avant elle, sont crédités du chemin qu’ils ont tracé et
qu’elle et d’autres continuent de forger. Sa vie a été passée sur l’eau –
sous sa forme naturelle ET glacée – et elle n’y changerait rien.
« Pour moi, le hockey reflète ce que sont un coucher et un lever de
soleil en pleine mer », dit-elle. « Nous tournons la page et nous
continuons à nous battre, une autre journée nous attend demain et nous
continuons à nous améliorer. »